Propos recueillis par Lyès Ibalitène
Pour entamer cet entretien, peut-on connaître votre appréciation du marché du poids lourd en Algérie ? La question est, bien-sûr, adressée à un responsable qui cumule plusieurs années d’exercice dans ce même marché, d’abord en tant que DG de Renault Trucks Algérie, puis, depuis 2010, au même poste chez Altruck Company, représentant de Volvo trucks.
Je dirais que c’est un marché qui évolue positivement. Aujourd’hui, nous avons à faire à des clients qui se professionnalisent, donc des clients qui son demandeurs d’un soutien et d’un service de la part du constructeur qu’ils ont choisi. Nous ne sommes plus dans un marché qui ressemble à un puzzle et qui pourrait offrir des opportunités à n’importe quelle marque qui souhaiterait s’y installer sans se soucier de mettre en place un réseau et un service apte à suivre cette évolution.
Il faut dire que les exigences du client algérien se rapprochent de plus en plus de celles qu’on pourrait rencontrer ailleurs, même en Europe. D’où l’impératif de s’y adapter et de mettre les moyens en harmonie avec ces exigences en hausse.
Le camion étant un outil de travail sur lequel le client doit compter, ce dernier est appelé aujourd’hui à se lier à un constructeur apte à lui offrir aussi bien un outil fiable qu’un service après vente dans le quel il trouverait tout le soutien nécessaire à sa profession, c’est-à-dire qui puisse lui fournir des prestations à la hauteur de ses besoins.
Doit-on comprendre à travers votre analyse que le marché du poids lourd en Algérie est en train d’atteindre le stade de maturité ?
Non, je ne parle pas de maturité. Je pense qu’on pourra parler de maturité lorsqu’on assistera à des renouvellements de flottes. Aujourd’hui, nous sommes plus dans une phase de croissance qui voit les clients soit constituer leurs flottes, soit les renforcer. Le jour où on rentrera dans une phase de maturité, c’est le jour où il y a aura des renouvellements de parcs avec tout le service qui accompagnera ce renouvellement.
La maturité c’est aussi une configuration de marché qui verrait les gestionnaires de parcs agir en professionnels en acceptant de confier la gestion de ces parcs aux constructeurs. Dans ce registre aussi, j’estime que nous sommes sur la bonne voie, mais nous devons poursuivre nos efforts de sorte à décharger au maximum les clients de la gestion de leurs flottes intra-muros et à les encourager à venir chez nous, y compris pour le service après-vente.
En attendant d’atteindre votre objectif et de récupérer la gestion totale des parcs clients, êtes vous au moins, dans l’état actuelle des choses, pour la fourniture de la pièce de rechange ou encore pour l’intervention de vos équipe de maintenance ?
Nos propres clients font confiance d’abord à Altruck Company en tant qu’importateur pour être sûrs qu’ils achètent de la pièce d’origine, d’autant qu’ils ont intérêt à maintenir leur outil de travail en état de marche. On a vu des clients qui, par souci de réaliser quelques insignifiantes économies, vont acheter de la pièce adaptable, voire contrefaite. A partir de là, ils vont endommager un outil de travail chèrement payé, qui coûte jusqu’à 10 millions de dinars. Ce qui n’est quand même pas rien. A partir de là, les clients sont conscients que nous leur garantissons l’authenticité de la pièce d’origine.
Ce qui signifie donc que vous n’êtes pas totalement exclus de la gestion des parcs, même si votre objectif réel consiste à ne pas vous limiter à fournir de la pièce de rechange mais à vendre tout un service après-vente…
Avec le réseau qu’on est en train de mettre en place, les clients s’aperçoivent qu’il ya de la pièce disponible chez les agents. Ça commence à aller dans le bon sens, mais il ya encore du chemin à faire pour faire admettre l’idée que chez nous, la prise en charge technique du client se fait selon les normes du constructeur Volvo. On est capable, selon les standards du constructeur que nous représentons, de maintenir l’outil de travail de notre clientèle en état de marche dans des conditions optimales. Si un client fait appel à des mécaniciens qui ne sont pas formés selon ces standards et qui n’ont pas d’outillage spécifique, il encourt le risque de surcoûts pour sa trésorerie, parce que des mécaniciens non formés peuvent commettre des erreurs dans le diagnostic ou la réparation, obligeant leur vis à vis de perdre du temps et de l’argent. Il faut noter aussi qu’un camion bien entretenu se revend presqu’à l’état neuf trois ou quatre ans après son premier usage.
Visiblement, c’est dans cette logique que vous développez depuis le début de notre entretien qu’Altruck Company a décidé de placer l’année 2012 sous le signe du service après-vente avec la campagne « Promotions d’Entretien 2012 »
Oui, c’est bien dans cette logique. C’est l’après-vente d’aujourd’hui qui fait les ventes de demain. Si aujourd’hui, on n’arrive pas à satisfaire le client dans l’après-vente, on le perd irrémédiablement, quand bien même on pourrait se prévaloir de posséder le meilleur camion au monde. Le client est aujourd’hui exigeant et il veut être sûr que son outil de travail est bien entretenu, qu’il peut avoir de la pièce d’origine pour l’exploitation de cet outil de travail et qu’il pourra aussi le revendre dans un état impeccable. Seul le réseau est capable de lui assurer cela.
Si le service après-vente revêt toute cet importance dans votre stratégie, pourquoi avoir attendu 2012 pour une campagne de l’envergure de « Promotions d’Entretien 2012 »?
Parce que notre réseau n’était pas suffisamment étendu pour le faire. Aujourd’hui, Altruck Company commence à avoir un réseau bien proportionné par rapport au parc, bien réparti sur le territoire national et qui nous permet déjà de répondre à la grande majorité de nos clients. Aujourd’hui, on peut s’estimer armés pour dire aux gens venez chez nous et c’est à nous de vous vous prendre en charge. Notre rôle à nous, c’est de développer le réseau et de le soutenir par des actions crédibles qui le hissent aux standards du constructeur et qui fidélisent le client.
Un réseau que vous comptez sans doute étendre et étoffer davantage durant cette année 2012…
Nous avons un agent qui vient de commencer à Akbou, et d’ici fin avril, nous en aurons un autre opérationnel à Sétif. Nous sommes également en discussions avec la SNTR pour nous appuyer sur leur réseau Maintenance Plus de sorte à ce qu’il intègre des agents agréés Volvo au sud, dans des axes stratégiques que représentent des villes comme Touggourt, Béchar, Adrar…
Peut-on avoir une idée sur la présence de Volvo Trucks dans les flottes en Algérie ?
On est très peu présents dans les flottes. Notre ambassadeur c’est la SNTR. Nous avons aussi une présence aussi chez Ifri. Il faut savoir qu’on est plus connu pour être le camion du patron chauffeur, puisque le Volvo s’achète comme une maison. Lorsqu’un client acquiert un Volvo, il en fait son outil de travail et son bien le plus précieux. C’est vrai qu’on aimerait se développer dans les flottes, mais comme nous évoluons dans un marché où c’est généralement le moins disant qui a le dernier mot…
On connaît Volvo pour être en force dans le marché du tracteur en Algérie. Faut-il déduire que vous n’avez pas suffisamment d’arguments à faire valoir pour d’autres gammes ?
Pas du tout. C’est vrai qu’on est en force dans le tracteur, mais on est aussi en train de développer la gamme chantier, à travers notamment le FMX qu’on a introduit l’année dernière. On veut en outre développer tout le segment de la gamme intermédiaire avec des applications plus spécifiques. Pour cela, nous avons plusieurs possibilités grâce aux empattements très variés de nos camions.
Volvo Trucks est connu pour être un constructeur précurseur en matière de solutions technologiques au profit de l’usage économique de l’outil de transport. Sentez-vous qu’en Algérie, cette démarche arrive à trouver un écho parmi une clientèle qui paye le gasoil à un prix nettement plus bas qu’en Europe?
Notre rôle à nous c’est justement celui de sensibiliser les clients sur ce point important, d’abord parce que moins de carburant fait du bien à l’environnement, ensuite parce que chaque dinar qui n’est pas dépensé est une économie de plus qui, à la longue, se répercute bénéfiquement sur les coûts d’exploitation. Pourquoi dépenser plus lorsqu’on peut économiser en frais de carburant. Dire que ça ne coûte rien, c’est faire de faux calculs.